19 Août, 21h je reçois un message texte de mon amie doula comme quoi sa cliente lui fait part d'un début de travail. Elle se rendra auprès d'elle à la demande de celle-ci pour partager un petit moment ensemble afin que la maman embarque dans son vortex rempli d'ocytocine.


20 Août en avant midi, je continue de prendre des nouvelles via mon amie et je me dirige en ville afin de me rapprocher du lieu de naissance avec ma famille. Plan A,B,C de gestion familiale. Je passe l'après-midi au soleil et dans la piscine en attends l'appel de ma cliente.


Vers 15h, mon amie Camille me texte ''viens t'en mon amie, Cécilia veut que tu viennes!''

Lorsque j'entre dans la maison de Cécilia, la fébrilité est au rendez-vous. C'est la deuxième fois que nous sommes ensemble, Cécilia et moi. La première fois, celle-ci avait assisté à un partage de tente rouge que j'avais animé avec une collègue doula et nous avions beaucoup connecté. Les sages-femmes sont là et nous restons en retrait pendant que la maman fait du ballon et boit une tisane. L'ambiance est douce et tout le monde chuchote. Les rideaux sont tirés afin de créer un atmosphère plus feutré. Deux heures plus tard, nous quittons toutes l'une après l'autre pour laisser les parents continuer de travailler doucement ensemble et de se créer une bulle...


Après le souper, j'endors mon bébé chez ma maman (qui habite à deux minutes de ma cliente) et je vais prendre une douche pour me réveiller en prévision d'une longue nuit. Vers 21h, je me rends de nouveau au domicile de ma cliente. J'arrive en même temps que Camille et nous rentrons doucement dans la maison. Il y a des bougies partout, il fait noir, l'autel de Cécilia est magnifique dans la lueur des flammes. La maman fait du ballon à quatre pattes et on sent qu'elle est plus embarqué dans ses contractions que plus tôt dans l'après-midi. Une écharpe tissé est accroché dans la porte d'entrée et Cécilia passe quelques heures à utiliser la suspension et l'hypnose pour se concentrer. Elle est belle, elle est bonne, l'atmosphère est tellement douce. Une partie de son équipe de naissance est à ses côtés, sa doula, Camille l'observe en souriant et en flattant sa propre bedaine d'une vingtaine de semaines. En arrière, son amoureux lui fait des points de pressions, flatte ses épaules, lui donne des gorgés pour qu'elle reste hydraté.

Camille propose différente position à Cécilia afin d'aider à faire bouger les choses. Elles vont s'installer sur le divan et les deux femmes travaillent ensemble pour gérer l'intensité des contractions que la maman a. Celle-ci vocalise beaucoup et peine à trouver une bonne positions. Cela semble plus douloureux que sur le ballon. Camille fait des points de pression, serre ses hanches, pèse sur son sacrum.


Vers 22h30, Cécilia retourne sur le ballon, essaie de se concentrer, l'intensité est tellement intense qu'elle laisse couler quelques larmes. Elle se colle sur son amoureux, tout le monde est présent et nous observons la danse de la vie. Sur son ballon, elle fait bouger ses hanches, souffle ses contractions, se laisser aller à l'intensité de la naissance de son bébé. L'une de ses sages-femmes lui offre des serviettes froides pour l'aider avec la chaleur du mois d'Août et de la force physique dont elle fait preuve. Kevin, son conjoint reste près de Cécilia, tandis que sa doula, ses sages-femmes et moi-même sommes assises sur le divan. C'est ça aussi les naissances, accompagner par la présence. Soutenir la maman par le quantum. Après une pause pipi, Cécilia décide d'aller essayer la piscine pour continuer le travail là. Les contractions cesse progressivement et, conjointement avec ses sages-femmes, elle décide de sortir pour repartir le travail. Elle se rend dans sa chambre pour avoir un examen vaginal pour évaluer son col.


Entre-temps, alors que nous sommes en attente sur le divan du salon, je propose à mes collègues d'aller chercher du café pour tous. La cliente est alors ouverte à 4cm. Lorsque je reviens avec 4 cafés, tout le monde est dans la chambre et Milène fait des points de pression et du rebozo sur les hanches de Cécilia qui est accoté sur son lit. Lorsqu'elle va se coucher dessus, elle semble épuisé, on voit les contractions de son utérus qui travaille fort. Points de pressions, serviettes mouillés, paroles douces, lumières d'ambiance, tout est présent pour aider la maman à vivre pleinement son accouchement.

Lors d'un examen vaginal, la sage-femme observe que son col est dilaté à 6cm mais qu'une enflure est présente. À la lumière de la chandelle, elle regarde son petit livre de ressource et nous dit à la blague qu'elle ne s'est jamais senti autant sorcière qu'à ce moment là! On ris ensemble. Elle va parler avec Cécilia dans la chambre et lui propose quelques remèdes naturels qu'elle pourrait essayer. La cliente ne se sent pas prête pour le moment.


Puisque Cécilia aimerait beaucoup donné naissance dans l'eau et que c'est une place où elle se sent bien, elle décide donc d'y retourner un peu. Les contractions cesse de nouveau. Vers 2h30 du matin, elle nous dit qu'elle aimerait transférer vers l'hôpital pour avoir l'épidurale, elle n'en peux plus. Camille se place devant Cécilia dans la piscine est lui parle doucement, la rassure, lui dit qu'elle fait le bon choix pour elle et qu'elle est magnifique dans tout son travail. Je lâche alors ma caméra pour aller m'accroupir près de mon amie et faire face à la maman. Ensemble, nous lui prenons ses mains, nous sommes là pour elle. Au même moment je reçois un appel de ma mère parce que je dois allaiter mon bébé. (Tout au long de la nuit, je suis retourné endormir mon bébé de 7 mois au sein en l'allaitant aux deux heures). J'ai peur de manquer l'arrivée à l'hôpital mais finalement je réussi à revenir juste avant que tout le monde transfère vers le milieu hospitalier.

Il est près de 4h du matin lorsque nous arrivons à l'hôpital. Rapidement on se fait dire qu'une seule personne de plus sera toléré aux côtés de la maman. Évidemment, Camille qui est la doula de Cécilia reste à ses côtés et je quitte vers chez moi. Après un long accompagnement, je vais me reposer.


Vers 5h30, Camille m'écrit pou me dire qu'elle ne se sent pas bien, son corps de femme enceinte est complètement épuisée de cet accompagnement qui s'allonge. Je quitte donc vers l'hôpital. J'arrive dans la chambre où les sages-femmes sont encore présente mais elles sont sur leur départ. Puisqu'il s'agit d'un transfert en milieu hospitalier et que la cliente décide d'avoir recours à la péridurale, il s'agit d'un transfert de suivi. À 6h, Cécilia reçoit enfin l'épidurale. Vanessa l'une des sages-femmes vient devant elle afin de la soutenir pendant qu'elle reçoit l'anesthésie. Quelques minutes après l'insertion de la médication, elle vomit. Nous lavons les bols, changeons les draps de Cécilia, sa jaquette, puis les sages-femmes quittent. Je quitte aussi pour aller déjeuner, reprendre des forces, me faire un matcha et allaiter (encore) mon bébé.

C'est un moment plus difficile pour Cécilia et Kevin, qui avait espéré accueillir leur deuxième bébé à la maison. Ils ont l'impression de revivre la naissance de leur grand garçon Wes. Je fais de mon mieux pour les rassurer, valider leurs émotions, être présente. Cécilia se cogne à plusieurs refus du milieu hospitalier et son moral peine à rester bon. Vers 10h, nous arrivons à faire un petit nid douillet, les lumières sont fermés, le personnel vient moins souvent, Kevin à donné les écouteurs de sa douce pour qu'elle se concentre. Le mot césarienne revient souvent et Cécilia garde son bout, elle veut attendre encore au moins une heure. Elle veut un sursis. La médecin de garde lui accorde mais lui fais part que c'est la dernière heure pour faire bouger quoi que ce soit avant de devoir aller au bloc opératoire. Je dis à Cécilia d'appeler son bébé, ''parle-lui! Appelle-le, vous le faîtes ensemble.'' Je retourne de nouveau chez moi pour manger, allaiter mon petit loup. J'avoue que je trouve ça difficile tout ça. Je n'ai pas dormi depuis plus de 24h, je sais que les parents sont tristes de la naissance qui est loin d'être comme ils avaient imaginés, mon bébé de sept mois qui a besoin de moi. Vers 11h30, les parents me textent qu'ils aimeraient que je revienne et je me mets en route. Même si je ne peux pas faire beaucoup rendu là, je sais que ma présence est apprécié auprès des parents, juste par mon soutien moral. Puisque le col de Cécilia est toujours enflé et ne dilate plus, il devient évident que la naissance devra être par césarienne. Les parents pleurent ensemble cette histoire qui se répète, Cécilia pleure ce qu'elle perçoit comme un échec, Kevin pleure leur désir commun d'accueillir leur garçon de façon naturelle et je pleure avec eux. Nous entendons les phrases, ''Tant que ton bébé est en santé'', ''C'est pas grave'', ''Faut pas pleurer''... L'amoureux de Cécilia quitte quelques minutes prendre l'air et je reste avec celle-ci pour valider tout ses sentiments. Elle a le droit de pleurer, elle a le droit d'avoir de la peine mais jamais elle ne doit voir tout ce qu'elle a vécu et ce qui s'en vient comme un échec. Je lui répète qu'elle et son amoureux ont fait un travail plus qu'exceptionnel, qu'ils m'ont impressionnés maintes fois, par leur communication, par leur amour, par leur force de caractère. Cette naissance ne sera pas comme prévue mais ce sera leur histoire.


Vers 14h, ils emmènent Cécilia vers le bloc opératoire et j'attends avec Kevin en bas, jusqu'à tant qu'ils l'emmènent lui aussi. Puis je quitte à 14h45.


Le 21 Août 2023, à 14h53, Eden est né.